Une Jeunesse allemande
de Jean-Gabriel Périot

Sortie en salle le mercredi 14 octobre 2015

 

 « Une Jeunesse allemande » de Jean-Gabriel Périot  traite du terrorisme et du passage à l’acte. Il relate l’histoire de la Fraction Armée Rouge, groupe d’extrême gauche auteur d’attentats, dans l’Allemagne de l’Ouest des années soixante-dix.  Un nom que n’utilisera jamais la presse qui les surnommera « la Bande à Baader » ou « groupe Baader-Meinhof », noms des deux fondateurs.   
Jean-Gabriel Périot s’intéresse depuis des années à la violence, et particulièrement aux violences révolutionnaires. Il a accumulé les lectures sur la RAF et a effectué un impressionnant  travail de recherches sur les archives audiovisuelles. 

Ulrike Meinhof. Photo du film Une jeunesse allemande
Une Jeunesse allemande © UFO Distribution

L’avis du bibliothécaire

A partir du milieu des années soixante, une partie de la jeunesse allemande a envie de changer la société : elle veut se battre contre la guerre du Vietnam, et, à l’intérieur du pays, contre la présence d’anciens nazis dans les rouages de la société et l’anticommunisme. La réponse de l’Etat, de la police est violente dans la répression des manifestations, dans les conditions d’emprisonnement et le durcissement des lois.

« Nous n’avons pas inventé la violence, nous l’avons rencontrée » 

 La phrase est prononcée dans un film tourné par les étudiants. Dans la lignée du mouvement de contestation,  ce qui va devenir le groupe RAF se lance dans la lutte armée : des braquages de banques pour pouvoir se procurer du matériel et des attentats meurtriers d’abord contre des cibles représentatives de l’impérialisme américain.
 
« Il y a une espèce de mécanique qui se met en place ». C’est le constat que fait Périot au cours de ses recherches et qu’il montre par un passionnant travail de montage. La particularité du film tient dans sa volonté de nous présenter les événements à travers des archives audiovisuelles qui parlent d’elles-même, sans commentaire ajouté.
 
La première partie, soit les deux tiers du film, rassemble des images produites par les contestataires et des extraits de leurs interventions dans les médias. Avant de devenir des terroristes, ces jeunes gens, la plupart étudiants, cultivés, ont produit des écrits théoriques et des films. Ulrike Meinhof  était journaliste, rédactrice en chef d’une revue de gauche (Konkret), réalisatrice ; d’autres, étudiants en cinéma, réalisaient des ciné-tracts, des films militants. « Les meilleurs de nos étudiants en cinéma deviennent des rebelles gauchistes » déplore un professeur.
On écoute avec fascination les arguments de ces jeunes gens qui, au moment où ils sont filmés, sont des opposants intégrés dans la société, qui essaient de la faire évoluer de l’intérieur.  « Ils ont vraiment cru qu’on pouvait faire la révolution avec des films. » explique le réalisateur.
 

A ce « nous allons gagner », nous répondons « Jamais ! »

Cette fois, la phrase est prononcée par un commentateur de la télévision. La lutte armée atteint son paroxysme entre le 11mai et le 24 mai 1972, quand cinq attentats sont commis par divers groupes de la RAF.
Pour en rendre compte, la seconde partie (plus brève) de « Une Jeunesse allemande » utilise les archives de la télévision et de la radio. Les reportages mettent en scène la traque d’Ulrike Meinhof puis l’arrestation en direct de Holger Meins, Gudrun Ensslin, et Andreas Baader.
En contrepoint des images officielles, un écran noir et la voix off de Meinhof dénonçant (lors de son procès) la torture de l’isolement, les privations sensorielles à laquelle elle est soumise depuis trois ans.
 
L’histoire de la RAF s’achèvera  en1977. Les morts se succèderont : au suicide de U. Meinhof dans sa cellule en 1976, s’ajoute un an plus tard, le  triple « suicide » (assassinats politiques ?) dans leur prison de Baader, Ensslin et Raspe.
 
Le film  est un bel exemple des liens entre cinéma et politique. Plusieurs extraits de films tournés dans la décennie, (dont la séquence finale de « Zabriskie Point » de Antonioni ou encore le dialogue entre Fassbinder et sa mère,  pour «  L’Allemagne en automne » film collectif  de 1977) accompagnent le récit des archives, témoignage des interrogations politiques des cinéastes. Jean-Gabriel Périot déclare faire des films pour aujourd’hui, c’est vrai, « Une Jeunesse allemande » nous donne de la matière pour penser notre aujourd’hui, en France, en Europe.
 

Rappel

Une Jeunesse allemande, de Jean Gabriel Périot – Production : Local Films, coproduction Alina Film, Blinkerfilm, 2015
1 h 30 minutes – Distribution : UFO

Distinction (s) : Cinéma du Réel – Compétition internationale – Prix Scam du jury international, mars  2015 ; La Berlinale (Festival de Berlin) – film d’ouverture section Panorama, février 2015

Voir un entretien avec le réalisateur : Dans le cadre du  festival Cinéma du Réel 2015, Jean-Gabriel Périot présente « Une Jeunesse allemande », par UniversCiné – 21 minutes
 

Publié le 01/10/2015 - CC BY-SA 4.0

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