Nice girls don’t stay for breakfast
de Bruce Weber

Sortie en salles le mercredi 27 février 2019

Portrait de l’acteur américain Robert Mitchum réalisé par Bruce Weber, photographe de mode et réalisateur de films documentaires qui avait notamment reçut en 1989 le Prix de la Critique de la Biennale de Venise pour son film sur Chet Baker Lets’ Get Lost.Lets’ Get Lost.

De gauche à droite, sous la photo de R.Mitchum : 2 de ses petites filles et Bruce Weber (Paris, février 2019) © Jacques PUY
De gauche à dr. sous photo Mitchum: 2 de ses petites filles et Bruce Weber (Paris, févr. 2019) © Jacques PUY

L’Avis du bibliothécaire

À la fin des années 1990, Bruce Weber a convaincu Robert Mitchum de faire un documentaire sur lui. Il l’a filmé en noir et blanc, en 16 et 35 mm, avec ses amis, dans des restaurants ou des hôtels, et en train de chanter lors de séances d’enregistrements chez Capitol Records pour un futur album. Robert Mitchum décède en 1997. Bruce Weber laisse tomber le projet. Il s’y remet des années plus tard et tourne des interviews de proches de l’acteur. Avec ce matériau et des extraits de films il réalise cet hommage à une grande figure du film noir hollywoodien.  
 
 
 

Biographie de Robert Mitchum

 
Né en 1917 dans le Connecticut, Robert Mitchum subit de plein fouet la Grande Dépression. À 11 ans, il quitte un foyer qui n’a plus de quoi le nourrir. Après quelque temps passé chez ses grands-parents et une arrestation pour vagabondage, il rejoint la cohorte des hobos, ces errants en quête de jobs ou d’aventure. Cette jeunesse à la dure lui forgera le caractère. Elle lui donnera aussi le désir d’un ancrage familial. En 1940, il épouse Dorothy, et leur union résistera à toutes ses infidélités.
 
Au début des années 1940, Robert Mitchum débute au cinéma comme figurant, puis obtient des petits rôles dans des westerns et des films de guerre. En 1944, il signe un premier contrat à long terme avec la RKO et dès l’année suivante, décroche un rôle important dans Les Forçats de la gloire (1945) de William A. Wellman. Pour son interprétation du Capitaine Walker, il décroche sa première, mais également sa dernière nomination aux Oscars. Le film terminé, il s’engage comme simple soldat dans l’Armée Américaine et combat en Europe. Il en sortira première classe et décoré de la Médaille de la Victoire de la Seconde Guerre Mondiale.
 
Dès ses débuts, Robert Mitchum joue avec naturel, à contre-courant de la vogue « Actors Studio ». Sa carrure, son flegme, son ironie en font un sex-symbol. Mais le jour où la police l’arrête en train de fumer de l’herbe, il se croit fini. Le patron de la RKO, Howard Hughues, fait alors réaliser une campagne de communication montrant Mitchum purgeant humblement sa peine. L’amour du public, acquis à la cause de ce mauvais garçon, fait le reste. L’acteur enchaîne les tournages avec les plus grands cinéastes, de Minnelli à Preminger.
 
Célèbre pour ses rôles dans les films Les Forçats de la gloire, Un si doux visage, La rivière sans retour, La nuit du chasseur, Celui par qui le scandale arrive, Le Jour le plus long, Deux sur une balançoire, La Bataille d’Anzio, La Fille de Ryan, La Bataille de Midway, Le Dernier Nabab, Les Nerfs à vif et Dead Man, il est l’un des acteurs majeurs des décennies 50, 60 et 70.
 
Mitchum, ce sont des frasques, de multiples liaisons (avec Ava Gardner et Shirley MacLaine, entre autres), une rétivité aux mondanités, un franc-parler réjouissant qui le fit déclarer devant la Commission aux activités antiaméricaines, en plein maccarthysme, qu’il répugnait à converser « avec des gens avec lesquels il n’irait pas boire des coups ». C’est aussi une décontraction, un « cool », qui ont conquis le public et les plus grands cinéastes. Il s’éteint en 1997 à Santa Barbara des suites d’un cancer du poumon.  

 

Un portrait

  Bruce Weber fait un portrait de ce « bad boy » qui a parfois dérapé, de ce dur à cuire qui est aussi un homme romantique et un excellent interprète de standards de jazz mélancoliques. Il a réalisé un montage d’extraits de films, de séquences filmées la dernière année de vie de l’acteur et d’interviews d’amis.
 
Les extraits de films montrent la présence et la puissance de l’acteur. Mais aussi son côté sombre: ainsi le 1er extrait choisi est-il une scène où Robert Mitchum agresse une femme avec un regard halluciné (Les nerfs à vif, 1961). A côté de cela, les séquences de 1997 où le cinéaste suit l’acteur vieillissant sont certes intéressantes mais beaucoup moins fortes. En effet, dans sa vie quotidienne, les dialogues ne sont pas scénarisés. Ses réparties sont moins brillantes et l’ironie qui caractérisait ses rôles moins incisive. Même si les femmes se montrent toujours pleines d’allant pour lui, l’impression ressentie est d’être dans le cliché, dans l’auto caricature, dans le cabotinage. De même les interviews de proches, d’acteurs (Johnny Depp, Danny Trejo, Clint Eastwood, Benicio Del Toro, …) alimentent le mythe de façon un peu attendue. On assiste également à des enregistrements de chansons de Mitchum en compagnie de Marianne Faithfull ou Rickie Lee Jones qui semblent tomber sous le charme de la voix grave travaillée au whisky. Son amour de la musique est un aspect peu connu de la vie de l’acteur. D’ailleurs le titre Nice Girls Don’t Stay For Breakfast est une chanson de Julie London, qui partageait l’affiche avec Mitchum dans L’Aventurier du Rio Grande.
 
Les belles images que Bruce Weber a tournées ne parviennent pas complètement à éclairer la personnalité de l’acteur, ni à illustrer l’idée d’un homme qui serait dur à la scène mais romantique dans sa vie privée, d’un poète derrière la tête brûlée. Nous ne sommes pas non plus en présence d’une biographie classique. Cependant le patchwork d’extraits de films nous replonge dans l’univers magnétique du film noir, de l’Amérique du milieu du 20ème siècle. De plus les séquences de 1997 documentent avec mélancolie les dernières années d’un sex-symbol évoluant dans le milieu du cinéma, entre inconnus, amis et stars.
 
Cela dit, dans le sillage du mouvement « #metoo », Le Monde titrait le 22 décembre 2018 : « Bruce Weber, déjà accusé en 2017 d’agression sexuelle par un ancien mannequin, a été de nouveau assigné en justice vendredi 21 décembre 2018, pour « exploitation sexuelle », par cinq mannequins masculins ». Les grands magazines avec lesquels il travaillait ont annoncé mettre fin à toute collaboration.

BRUCE WEBER’S NICE GIRLS DON’T STAY FOR BREAKFAST – Excerpt 2 from Richard Lormand on Vimeo.

Rappel

Nice girls don’t stay for breakfast de Bruce Weber, Etats-Unis, 2018, 1h 33 min., production, distribution: Little Bear Films

Publié le 13/02/2019 - CC BY-SA 4.0

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