Soyons honnêtes, nous savions que ce voyage allait être enthousiasmant, mais nous n’imaginions pas être surpris·es à ce point !
Évidemment, nous savions que nous allions visiter des établissements récents, des équipes impliquées et des projets ambitieux. En revanche, nous ne pouvions pas prévoir que les différences de fonctionnement, d’organisation, de gouvernance seraient si étonnantes par rapport à ce que nous connaissons en France. Cela était notable en particulier à Bilbao, San Sébastián et Errenteria. Ces trois bibliothèques ont d’ailleurs en commun d’être installées dans une usine réhabilitée. Les deux premières partagent l’espace avec d’autres services (culturels, sportifs, créatifs). La troisième avec un espace auditorium/salle de spectacle/lieu de résidence artistique.
Gouvernance : de nombreux partenariats public-privé
Un modèle inconnu en France semble émerger en Espagne en parallèle des réseaux municipaux classiques (i.e. ressemblant aux nôtres). Il repose sur un modèle économique mêlant fonds publics et fonds privés. La bibliothèque de l’Azkuna Zentroa Alhóndiga de Bilbao, par exemple, a le statut de Société anonyme publique, elle dépend de la municipalité, mais fonctionne pour 40% avec des fonds privés, dont le mécénat d’une banque.
On a retrouvé un modèle similaire à San Sébastián pour la Tabakalera, qui vient compléter un réseau de 14 bibliothèques de quartier.
Plus atypique peut-être encore, l’exemple de la Lekuona Fabrika à Errenteria (où la visite a été assurée par un élu en bermuda). La gestion des espaces publics du centre culturel en général et en particulier ceux de la bibliothèque et de son auditorium est mixte. Elle est répartie entre les professionnels de la bibliothèques, les artistes qui interviennent au centre culturel et les élu·es.
Fonctionner en résonance et en réseau
Ces principes d’organisation ont un fort impact sur le dynamisme et le fonctionnement des bibliothèques. Parce qu’ils se partagent des lieux et des publics, parce qu’ils réfléchissent ensemble, parce qu’ils sont hybrides par nature, ces lieux sont plus-que-des-bibliothèques. On y trouve toute l’offre d’une bibliothèque, mais le réseau de liens et de ramifications dans lequel elle est imbriquée la vivifie autant qu’elle la justifie.
Personnel : peu de titulaires, beaucoup de vacataires
Plus étonnante, plus perturbante pour les bibliothécaires français, est la gestion des personnels dans ces bibliothèques.
À l’Alhondiga : 18 personnes pour gérer les 250 « intervenants » qui font vivre le lieu (piscine, radio, cinéma etc. et bibliothèque). Le réseau de 15 bibliothèques publiques ouvre quant à lui de 9h00 à 20h30 du lundi au samedi avec 64 personnes, dont 20 à la centrale.
Du côté de San Sebastián, la Tabakalera compte 15 personnes dédiées à l’accueil, 5 au traitement des documents, 1 technicien et 3 coordinateurs pour faire tourner la bibliothèque et son fablab, accueillir 1 000 personnes tous les jours de 10h à 20h.
À Irun, la bibliothèque reçoit également environ 1 000 personnes par jour dans 4 500 m2 avec 11 personnes, qui grosso modo font les trois huit.
Des chiffres à méditer !
Publié le 04/04/2023
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