Objectif de l'action :
Mieux accueillir, informer et servir un public de migrants qui fréquente quotidiennement et pendant de longues heures la Bibliothèque publique d’information et qui, avant la mise en place de la médiation assurée par un intervenant de France terre d’asile, utilisait exclusivement un service de la bibliothèque : la consultation gratuite d’internet.
Il s’agit de rendre accessible la bibliothèque à un public qui ne parle ni français, ni anglais : en levant l’obstacle de la langue grâce aux compétences linguistiques d’un médiateur capable de s’exprimer dans des langues familières à ce public (en l’occurence, le dari, le farsi, le pachto, l’ourdou, le bengali,…), permettre à ce public l’accès aux collections, services et contenus proposés par la bibliothèque.
Après la réalisation par France terre d’asile d’un diagnostic préalable à la mise en place de la médiation, en interrogeant les intéressés sur leurs besoins, au regard des offres disponibles à la bibliothèque, trois axes ont été fixés à cette médiation :
- l’accès aux droits (information sur le droit d’asile, la protection des mineurs isolés étrangers) ;
- l’orientation vers des structures spécialisées d’accueil des demandeurs d’asile et réfugiés ;
- l’accès à la bibliothèque (information sur la bibliothèque en général, les différentes collections et services qu’elle propose, en particulier l’offre disponible dans l’espace Autoformation et accompagnement individuel en fonction des besoins singuliers de chaque personne dans l’utilisation de ces offres).
Description de l'action :
Depuis juillet 2010, à raison de deux fois par semaine, les jeudis et vendredis, un médiateur de France terre d’asile assure une permanence à la Bpi afin de renseigner le public de migrants présent quotidiennement à la bibliothèque sur ses droits :
- examen de la situation spécifique de la personne au travers d’un entretien individuel mené dans la langue la plus facile à utiliser pour l’interlocuteur,
- information sur le droit d’asile,
- la protection des mineurs isolés étrangers,
- la procédure à engager pour faire valoir ses droits,
- les structures spécialisées qui peuvent prolonger l’accompagnement individuel du demandeur d’asile ou du réfugié
Les collections et les services de bibliothèque sont également méconnues de ces usagers ou inaccessibles du fait de l’obstacle linguistique.
L’absence de langue commune aux bibliothécaires et à ces usagers limite les interactions habituellement existantes pour faciliter l’appropriation de la bibliothèque aux usagers. D’où la mise en place d’un accueil spécifique, accompagné de documents accessibles dans leur contenu et de services accessibles dans leur présentation et leur mode d’utilisation.
Cette médiation prend la forme de permanences lors desquelles l’intervenant de France terre d’asile réalise des entretiens individuels permettant de définir l’attente et les besoins du migrant et de lui répondre.
Il peut s’agir de lui rendre accesssible le droit, grâce à son expertise et en s’appuyant sur une documentation ou en orientant vers des structures spécialisés. C’est un rôle de « living book » (livre vivant). Si la documentation sur le droit est disponible sur les étagères de la bibliothèque mais elel n’est en fait pas accessible à ce public : le médiateur, par son savoir, se substitue dans cette situation aux livres pour devenir lui-même une partie de la collection, accessible à ces personnes).
Le médiateur accompagne la personne qu’il reçoit dans les espaces de la bibliothèque pour se faire son interprète auprès des bibliothécaires chargés de renseigner le public ou pour présenter lui-même services et collections et accompagner le migrant pour lui faciliter les premiers pas dans l’utilisation de ces offres.
Cet accompagnement, compte tenu des besoins exprimés, porte très souvent sur la présentation de l’espace Autoformation et l’utilisation des ressources qu’il propose, notamment les méthodes d’apprentissage du Français langue étrangère.
Voir l’espace Autoformation.
Périodicité de l'action :
2 fois par semaine depuis juillet 2010
Moyens humains et techniques :
Un médiateur compétent dans les domaines concernés par la médiation salarié de France terre d’asile et formé à la bibliothèque par la Bpi : connaissance du droit d’asile, et de la protection des mineurs isolés, connaissance des lieux spécialisés dans l’accompagnement des demandeurs d’asile et réfugiés, connaissance de la bibliothèque (son fonctionnement, ses collections, ses services).
Un médiateur polyglotte : l’actuel médiateur qui assure ces permanences depuis juillet 2010 parle français, anglais, dari, farsi, pachto, ourdou et bengali, de sorte qu’il peut renseigner un public de migrants aux origines diverses dans une langue qui leur est familière et qui facilite le dialogue et l’expression.
Un référent Bpi et un référent France terre d’asile avec lesquels le médiateur échange chaque semaine pour donner suite aux questions ou demandes posées par le public qu’il sert et pour discuter du déroulement de la médiation.
Depuis janvier 2012, pour faciliter les échanges entre les parties du partenariat et pour communiquer plus facilement sur le contenu de la médiation et ses variations, un journal de médiation est rédigé chaque mois par le référent Ftda suite à ses échanges hebdomadaires avec le médiateur.
Une convention de partenariat fixant les cadres de la médiation.
Une sensibilisation de l’ensemble du personnel de la Bpi à la mise en place de cette action, ainsi qu’aux enjeux des migrations internationales (organisation d’un « mardi de l’information » à l’attention du personnel : une conférence-débat assurée par le Président de France terre d’asile) et aux droits des étrangers (« mardi de l’information » assuré par le GISTI).
Une relation étroite du médiateur avec les bibliothécaires intervenant aux bureaux de renseignement « Information générale » et « Autoformation ».
Une information sur l’existence de cette médiation, ses objectifs (les 3 axes, cf.Objectifs), informations pratiques en relation, est disponible à la Bpi sous forme de flyer, et d’affiches rédigées en français, anglais et farsi. Un espace d’accueil visible et à proximité de l’espace très fréquenté par le public cible (table basse et fauteuils + documentation facilitant le travail du médiateur sur l’aspect accès au droit (cf. publications de FTDA)).
Le médiateur circule dans la bibliothèque, va à la rencontre du public qui peut être intéressé par la médiation.
Partenaires impliqués
L’association France terre d’asile qui est rémunérée pour sa prestation : 6 500 euros en 2013.
Résultat et perspective :
En 2013, 91 permanences ont été assurées, 326 entretiens individuels ont été menés, 6 030 migrants ont été rencontrés. 25 % des personnes rencontrées étaient des mineurs. La majorité des migrants est d’origine afghane (54 %), parlant essentiellement dari ou pachto. D’autres pays sont représentés comme l’Iran (27 %) et le Pakistan (8 %) ainsi que des pays d’Afrique subsaharienne (9 %).
Bilan au niveau de FTA
42 % de ces personnes sont engagées ou ont vocation à engager une procédure de demande d’asile tandis que 21 % sont en attente d’un transfert dans le cadre de la procédure Dublin. Si une grande partie des mineurs venant à la permanence sont déjà pris en charge soit par France terre d’asile, soit par l’Aide sociale à l’Enfance (ASE), 26 % viennent pour solliciter une prise en charge afin de mettre fin à leur situation d’errance. La majorité des migrants souhaitent avoir une information sur leurs droits et être orientés vers des dispositifs de prise en charge.
En outre, c’est un lieu où ils peuvent échanger entre eux, exprimer leurs ressentis sur leurs conditions de vie, leurs procédures, leurs expériences avec la police, les passeurs et les associations chargées de leur venir en aide. La médiation FTA au sein de la Bpi s’est, au fil des ans, transformée en véritable permanence d’information et d’orientation.
Bilan au niveau de la Bpi
Le médiateur a facilité aux publics migrants l’accès aux services de la bibliothèque qu’ils considèrent comme le seul endroit où ils peuvent apprendre le français grâce à l’espace Autoformation, et trouver des ressources documentaires dans leur langue maternelle : presse, supports audiovisuels, ouvrages littéraires…
La Bpi constitue aussi un lieu de gestion de l’attente. Par des activités d’autonomisation et d’intégration tel que l’apprentissage du français, la bibliothèque permet aux demandeurs de combler les longs mois de la procédure d’asile, 19 mois en moyenne, tout en restant connectés à leur pays et culture d’origine.
En 2013, sur les 6 030 migrants venus à la permanence, 986 ont été orientés vers l’espace Autoformation pour utiliser principalement le logiciel d’apprentissage du français Learn French. Ce logiciel utilise des pictogrammes et des dessins en plus de textes disponibles en de nombreuses langues dont le farsi, le pachto, le dari et le urdu. L’organisation par niveau de connaissances offre aux apprenants un sentiment de progression et une motivation : passer au niveau supérieur.
Nombreux sont ceux qui touchés par la médiation, progressent alors rapidement dans l’apprentissage du français et se mettent à fréquenter la Bpi de manière assidue en dehors des jours de la permanence. Certains migrants complètent d’ailleurs l’acquisition de notre langue en suivant les Ateliers de conversation de la bibliothèque tandis que les mineurs, ayant trouvé un hébergement au sein de FTA suite à leur venue à une permanence, recourent au service Accueil des associations du champ social en Autoformation pour compléter leur apprentissage linguistique.
Documents en ligne
- Bibliothèque pour tous, précaires et exclus compris par Mathilde Gérard, article paru sur le Blog du Monde, 6 juin 2013
- 7 milliards d’êtres humains, mille milliards de communautés… et une bibliothèque pour chaque. La bibliothèque au service de toutes les communautés par Hélène Deleuze dans le cadre du congrès de l’IFLA à Helsinki le 16 août 2012
- Seven billion human beings, a thousand billion communities… and a library for each and every one. The library at the service of all communities by Hélène Deleuze from Bpi, IFLA, august 2012
- Le Paris des Afghans : regard sur une catégorie invisible et précaire d’exilés du 10e arrondissement, France terre d’asile et Emmaüs Solidarité, novembre 2011
- S’associer aux associations, article paru dans le magazine de la Bpi De ligne en ligne, n°4, janvier-mars, 2011
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